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Écrire est un jeu

Écrire est un jeu
(et le jeu est toujours frustrant, difficile et compliqué

Les questions restent, les réponses changent. Voici celles de François Blais.

Questionnaire LQ
(et le jeu est toujours frustrant, difficile et compliqué

Les questions restent, les réponses changent. Voici celles de François Blais.

Est-ce que le roman est mort?

Là, puisque c’est la première question et qu’il est important de partir du bon pied, il faudrait que je trouve en moi la maturité de répondre autre chose que «Je ne savais même pas qu’il était malade». Bon, oui, j’imagine que le roman est mort. Des gens qui en savent beaucoup plus long que moi ont annoncé sa mort, et il me semble que je dois les croire sur parole. (Il serait intolérable de vivre dans un monde où des types comme André Breton, Milan Kundera et Roland Barthes parleraient à travers leur chapeau.) Ceci dit, cette mort ne m’affecte pas tellement, sans doute parce que je ne suis pas assez lucide/cultivé/talentueux pour percevoir les limites du genre. Je suis parfaitement à l’aise avec les codes du roman et, si on me laisse faire, je vais écrire des romans toute ma vie.

 

La qualité ou le défaut d’un éditeur, d’une éditrice?

La qualité principale d’une éditrice est, à mon avis, la franchise. (Il y a la compétence, bien sûr, mais on tient la compétence pour acquise.) Elle doit être capable de dire sans détour ce qui cloche dans un texte. Comme auteur, on sait toujours un peu ce qui cloche, mais on fait souvent du déni, parce qu’on se souvient de tout le travail investi dans ces parties qui clochent, et de tout le travail que ça demanderait pour qu’elles cessent de clocher. Il y a toujours une très grande distance entre le manuscrit que je soumets et le livre imprimé. La dernière éditrice avec laquelle j’ai collaboré (à La courte échelle) a travaillé très fort pour nettoyer mon manuscrit de toutes ses incohérences, redondances, platitudes et culs-de-sac, au point que c’en est presque injuste que son nom ne figure pas sur la couverture. S’il me prenait l’idée insensée de m’autoéditer, je sais bien que je n’arriverais qu’à produire de la bouillie pour les chats.

 

Avez-vous une béquille littéraire? Si oui, laquelle? Expliquez.

Dans tous mes récits à la première personne, j’utilise un narrateur féminin pour faire croire que le personnage n’est pas exactement moi.

 

Le roman que j’ai honte d’avoir lu?

La réponse qui me vient spontanément est qu’il est ridicule d’avoir honte de ses lectures. (Oui, d’accord, les lecteurs de 50 Shades of Grey devraient être gênés mais, en même temps, ils sont sans doute trop nonos pour ressentir de la honte.) Toutefois, avec le recul, je dois dire que j’ai honte d’avoir lu Fend-le-vent et le visiteur mystérieux en troisième année. La maîtresse m’avait surpris à lire Les malheurs de Sophie, et elle m’avait fait comprendre à demi-mot qu’il s’agissait d’un «livre de filles» (parce que le personnage principal était une petite fille, qu’il avait été écrit par une femme et que la couverture était rose dans l’édition que je possédais), et que je devais en cesser la lecture immédiatement. À la place, elle m’a enfoncé dans la gorge ce Fend-le-vent et le visiteur mystérieux, un «livre de gars» que j’ai trouvé vraiment plate, mais que j’ai lu d’une couverture à l’autre parce que je ne voulais pas déplaire à la maîtresse.

 

Le pays dont je préfère la littérature?

La Russie. Pendant la période de ma vie où j’étais un peu intense, j’aimais tellement les grands auteurs russes que j’ambitionnais d’aller vivre en Russie, dans une datcha perdue au milieu de la Sibérie, quelque part dans le coin d’Iekaterinbourg. Une icône du XIIe siècle au mur, un gros poêle au milieu de la place et un samovar sur une table basse. Je voulais vivre exactement comme Oblomov: me prélasser au coin du feu, manger des cornichons salés, boire de la vodka, contempler la steppe d’un air rêveur. J’aurais eu une épouse qui se serait peut-être appelée Anna Arcadievna ou Nastassia Philippovna. Ça fait longtemps que je ne suis plus intense, mais j’ai quand même gardé une affection pour la littérature russe, à cause du mélange de mélancolie et d’humour désespéré, des grands espaces, de la neige,des chicanes entre slavophiles et  occidentalistes (qui ne sont pas de mes affaires, mais qui me passionnent quand même), et surtout des personnages trop intelligents pour leur propre bien, aux motivations floues et compliquées.

 

Le livre qui fait partie intégrante de l’écrivain que je suis devenu?

The Life and Opinions of Tristram Shandy, Gentleman, de Laurence Sterne. D’abord, c’est la chose la plus drôle jamais écrite.
Lire une seule page de Tristram Shandy me fait davantage rire que n’importe quel show de n’importe quel humoriste. Et puis, c’est un roman entièrement constitué de digressions. Le narrateur tourne interminablement autour du pot, au point qu’il en oublie le pot. C’est de loin le roman qui m’a le plus influencé comme auteur, parce que moi aussi j’essaie souvent d’être drôle, et moi aussi j’adore tourner autour du pot.

 

Si je n’écrivais pas, je…
Jouerais à des jeux vidéo.

 

Mon personnage fictif préféré?

J’ai un faible pour Mycroft Holmes. C’est un surdoué (il est même décrit comme étant plus brillant que son petit frère, Sherlock), mais il est paresseux, indolent et complètement dépourvu d’ambition. Il pourrait accomplir de grandes choses, mais il préfère passer ses journées à son club de gentlemen, à fumer son cigare et à lire son journal. D’une manière générale, j’aime beaucoup les personnages qui gaspillent sciemment leurs talents.

Votre pire et votre meilleur souvenir d’écriture?

Il me serait difficile d’identifier un meilleur moment d’écriture, étant donné qu’il s’agit d’une activité très routinière. Je suis généralement heureux quand j’écris, surtout quand j’ai tout mon temps et que j’ai une théière et des biscuits à portée de main.
Le bonheur d’écrire est une variété particulière de bonheur, puisqu’il est presque entièrement composé de sentiments négatifs
(la frustration de ne pas arriver à exprimer précisément ce que j’ai en tête, le découragement devant la tâche à accomplir, la tentation presque irrésistible de garrocher l’ordi et de faire autre chose,etc.), mais c’est tout de même le plus grand bonheur qui soit. Écrire est un jeu, et le jeu est toujours frustrant, difficile et compliqué (sinon, c’est un jeu plate).

Tout de même, je dirais que mon meilleur souvenir d’écriture remonte à 2002, alors que, par un concours de circonstances, je me suis retrouvé à vivre seul en appart dans une ville où je ne connaissais pas grand monde. J’ai alors décidé que c’était le moment idéal pour essayer d’écrire un roman. Vérifier si j’avais ça en moi. J’allais avoir trente ans bientôt et, même si j’écrivais depuis longtemps pour mon plaisir personnel, je n’avais jamais eu l’idée de m’y mettre sérieusement. À cette époque, je n’aurais pas pu nommer trois maisons d’édition québécoises. J’ignorais même l’existence de celle qui allait devenir la «mienne (L’instant même). J’ai donc ouvert un fichier Word et je me suis mis au travail, pour finalement découvrir que oui, j’étais capable d’écrire un roman. Si je garde un si bon souvenir de cette période, c’est sans doute parce que j’étais complètement absorbé par l’écriture. J’étais sur le bs, alors je n’avais que ça à faire, à part manger et aller promener le chien.

 

Est-ce que je lis les critiques de mes livres? Pourquoi?

Tout le monde lit les critiques de ses livres, non? On écrit d’abord pour soi, c’est vrai, mais si on décide de publier ce qu’on écrit, c’est quand même un peu pour les autres. Je suis toujours curieux de savoir ce que les gens pensent de mes livres. Je n’accorde pas une importance particulière aux critiques professionnels. Je dirais même que je préfère l’avis des gens sur les sites comme Goodreads, qui disent carrément (parfois brutalement) ce qu’ils pensent, sans mettre de gants blancs, sans chercher à bien tourner leurs phrases, sans se préoccuper de «placer l’œuvre dans son contexte», et toutes ces affaires-là. Ceci dit, je crois qu’il ne faut pas accorder une importance démesurée aux critiques, et je suis toujours embarrassé quand je vois un collègue ruer dans les brancards à cause d’une mauvaise critique.

 

Y a-t-il une autre manière d’écrire que sous la contrainte?

Je ne pense pas. Mais, en même temps, cette contrainte est artificielle, parce que je sais bien que tout le monde, sauf moi,
se fout du roman que je suis en train d’essayer d’écrire. J’ai certes un petit lectorat fidèle, il y a des gens qui apprécient ce que je fais, mais personne n’en ferait un fromage si je décidais d’arrêter. Pour parvenir à pondre mes cinq cents mots par jour (c’est mon quota), je dois me faire accroire qu’il est d’une importance capitale que j’arrive au bout de ce manuscrit. Je suis un patron très vache envers moi-même, je n’accepte aucune excuse et il est très rare que je m’accorde une journée de congé. Les jours où je n’arrive pas à écrire, où rien ne sort (ou que ça sort tout croche), je me force à faire de la recherche ou de la lecture en rapport avec mon projet.

C’est beaucoup plus facile quand la contrainte vient de l’extérieur, sous la forme d’une date de tombée.

 

L’écrivain dont je suis jaloux…

Je pense qu’il ne sert à rien de se jalouser entre écrivains. Et puis, si je me mettais en tête d’envier tous ceux qui ont davantage de talent que moi, je me rendrais très malheureux. Ceci dit, je suis tout de même un petit peu jaloux d’Alexie Morin à cause de cette capacité qu’elle a (mélange de talent, d’intelligence, de sensibilité et d’habileté technique) d’exprimer, avec élégance et sans avoir l’air de se forcer, des choses que j’aurais cru impossibles à exprimer en français. Cette phrase de Flaubert traduit bien la frustration qui m’habite quand je peine à traduire en mots une idée complexe, un état d’âme fugitif ou un alliage inusité de sensations: «La parole humaine est comme un chaudron fêlé où nous battons des mélodies à faire danser les ours, quand on voudrait attendrir les étoiles.» Je crois que certaines zones de la psyché humaine vont demeurer à jamais hors d’atteinte des mots, que certaines réalités sont trop fugaces et trop subtiles pour se laisser prendre par les filets grossiers du langage. C’est pourquoi je suis toujours déchiré entre la jalousie et l’envie d’applaudir quand un écrivain (mettons Virginia Woolf, Marcel Proust, Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski ou Alexie Morin) me donne tort et arrive à épingler sur la page l’une de ces réalités que je croyais jusque-là inexprimables.

Je suis également rempli d’admiration pour ceux qui arrivent à peindre de manière claire et simple une scène complexe, ou à décrire l’évolution d’un corps dans l’espace sans que le lecteur s’y perde. (C’est vraiment plus difficile qu’il n’y paraît.) Une autre citation (de Julien Green cette fois) qui me revient souvent en tête quand j’écris et que je me retrouve embourbé dans un passage difficile: «La pensée vole et les mots vont à pied. Voilà tout le drame de l’écrivain.» Encore une fois, j’ai l’impression que ça ne s’applique pas à Alexie Morin et, oui, je suis quand même un peu envieux à cause de ça. (En ce qui me concerne, on peut dire que ma pensée vole, même si elle ne vole pas très haut, mais j’ai souvent l’impression que mes mots vont en rampant.)

 

Quels auteurs vous ont le plus inspiré dans votre propre écriture?

Quand j’ai commencé à écrire, à l’adolescence, j’étais obsédé par Boris Vian, et j’étais convaincu que ça ne valait pas la peine d’écrire si on n’écrivait pas exactement comme Boris Vian. J’ai rédigé des dizaines de petites histoires «à la manière de…». (Enfin, je m’imaginais que c’était «à la manière de…», mais c’était plutôt du sous-sous-sous-sous Boris Vian. Je le sais parce que ces histoires existent encore, et ce n’est pas beau à voir.) Quand mon premier roman est paru, Christian Desmeules a qualifié mon écriture de «cartoonesque». Ce n’était pas un compliment, mais ça ne m’a pas déplu, parce que ce côté cartoonesque est ce qui me reste de ma période Boris Vian.

Au début de la vingtaine, j’ai essayé d’avoir une période Réjean Ducharme, mais j’ai vite abandonné parce que mon style naturel est trop incompatible avec le sien. Mon écriture est entièrement dépourvue de jeux sur la langue et d’images. C’est pourquoi je ne comprends pas trop ceux qui trouvent que je m’amuse à faire du sous-sous-sous-sous Réjean Ducharme.

Un peu plus tard, j’ai eu une période Céline. Les résultats étaient aussi lamentables qu’on peut l’imaginer. (Par contre, je suis fier de dire que je n’ai jamais eu de période Bukowski. Je n’ai même jamais été capable de terminer un livre de Bukowski.)

Au bout du compte, les auteurs qui m’ont le plus inspiré sont ceux qui semblent écrire «au fil de la plume», comme Laurence Sterne, Mark Twain, Miguel de Cervantès, William Makepeace Thackeray. J’aime beaucoup les écrivains «nonchalants», surtout depuis que j’ai découvert tout le travail que ça exigeait afin de parvenir à cette «nonchalance». Comme j’ai passé l’âge d’avoir des périodes, ces influences sont plus obliques, mais je sais que je ne serais pas l’écrivain que je suis si je n’avais jamais ouvert Roughing It, The Luck of Barry Lyndon ou The Life and Opinions of Tristram Shandy, Gentleman.

 

Pourquoi Réjean Ducharme est-il un écrivain important?

En tout cas, il est un écrivain important pour moi car, lorsque je l’ai découvert, à dix-huit ans, je croyais en avoir fini avec la littérature québécoise. Il faut dire que mes profs de français successifs à l’école secondaire Le Rocher avaient travaillé fort pour me dégoûter des auteurs québécois, me forçant à avaler des affaires comme Agaguk, Menaud, maître-draveur et Le Survenant.

Vraiment, je n’ai rien contre Agaguk (pas grand-chose pour non plus), ça se laisse lire, mettons, mais je me souviens d’avoir pensé que si nos «classiques» étaient de ce calibre-là, alors je n’avais aucune envie d’aller voir de quoi le tout-venant avait l’air. Notre littérature est jeune, d’accord, et le corpus littéraire canadien-français est forcément plus mince que celui de la France, qui accumule les chefs-d’œuvre depuis des siècles. Mais la littérature russe est également jeune, et j’avais déjà décidé, en secondaire 4, que Germaine Guèvremont, Philippe Aubert de Gaspé, Félix-Antoine Savard, Louis-Honoré Fréchette, Octave Crémazie, Yves Thériault et compagnie ne faisaient pas le poids face à Dostoïevski, Gogol, Tchekhov et Tolstoï. Je lisais les Mémoires écrits dans un souterrain en cachette dans le cours de chimie, et Agaguk au grand jour dans le cours de français, et je mesurais l’ampleur du fossé entre nos classiques et les leurs.

J’étais convaincu que notre littérature était de seconde zone, simplement parce qu’il ne serait pas passé par la tête de Louis-Paul Descôteaux et d’André Prince de nous faire lire Réjean Ducharme. Et moi-même je n’avais jamais eu l’idée de prendre les devants, malgré L’avalée des avalés et L’Océantume qui traînaient dans la bibliothèque de mes parents depuis ma naissance.
De toute façon, les couvertures étaient peu invitantes et, surtout, je ne pensais pas qu’il pouvait sortir quelque chose de bon d’un type prénommé Réjean. Mes auteurs préférés à l’époque portaient des noms infiniment moins triviaux: Fiodor Mikhaïlovitch, Anton Pavlovitch, Lev Nikolaïevitch,etc. Réjean… pourquoi pas Gaétan, un coup parti?

Il a fallu que je me retrouve, vers la fin de ma deuxième année en Arts et Lettres au cégep de Shawi, avec un travail à remettre la veille sur un roman québécois de mon choix, pour que je me pince le nez et que j’ouvre enfin L’avalée des avalées. Réjean m’a eu au premier paragraphe. J’ai lu le roman d’une traite, complètement fasciné. J’ai découvert ce soir-là qu’un auteur québécois pouvait jouer dans la même ligue que tous les Anton Pavlovitch du monde. Incidemment, je n’ai pas fait mon travail sur L’avalée des avalés, parce que je ne voulais pas que l’école vienne salir mon amour pour Bérénice Einberg. (À la place, j’ai bâclé quelque chose sur La grosse femme d’à côté est enceinte, sans me donner la peine de lire le bouquin.)

 

Aimeriez-vous écrire pour le cinéma un jour? Y a-t-il des films qui vous ont marqué plus que d’autres?

J’adorerais écrire pour le cinéma! Premièrement parce que c’est beaucoup plus facile d’écrire un scénario qu’un roman:
on n’a pas à se préoccuper de bien polir notre style, de créer une atmosphère, de décrire les lieux et les personnages en détail. La caméra fait tout le travail à notre place. Et puis on n’est pas responsable du résultat final, puisque c’est le nom du réalisateur qui est mis de l’avant. (Tout le monde sait que, mettons, Schindler’s List est un film de Steven Spielberg, mais à peu près personne ne pourrait nommer le scénariste sans demander à Wikipédia.) Surtout, écrire pour le cinéma est beaucoup plus payant que d’écrire des romans. (En même temps, presque tout est plus payant que d’écrire des romans.)

Pourquoi écrire pour les jeunes?

Il ne me serait jamais venu l’idée d’écrire pour les jeunes si je n’avais pas été sollicité. Dans le cas de mes albums pour les petits enfants, c’est l’illustratrice qui m’a demandé de lui écrire des histoires. Et pour ce qui est de mon roman pour les adolescents, c’est l’éditrice de La Courte Échelle qui m’a approché pour que je soumette un texte. Je n’aurais jamais osé me lancer dans la littérature jeunesse de ma propre initiative, parce que c’est un public qui me fait un peu peur. À tort ou à raison, je vois les jeunes comme des lecteurs très exigeants et très difficiles. Surtout les adolescents, qui sont sursollicités, surstimulés, et qui ont toujours un écran à portée de main. En écrivant mon roman destiné aux lecteurs de onze à treize ans, j’avais l’impression de devoir ramer fort pour garder leur intérêt, les inciter à tourner la page et à lire la prochaine. Je ne sais pas trop si j’y suis arrivé, car le roman vient tout juste de paraître et je n’ai pas encore eu de feed-back. (La madame du Devoir l’a trouvé correct, mais c’est une grande personne, ça ne compte pas.)

Avez-vous un rituel d’écriture? Écrivez-vous le matin, le soir, la nuit? Dans un bureau, dans le salon? Aucune de ces réponses.

J’écris toujours le matin, quand mon niveau d’énergie est à son maximum. C’est très fragile, mon affaire. Pour tirer le meilleur parti de mon petit filet de talent, il faut que les conditions soient idéales: je dois être bien reposé, habillé en mou, n’être distrait par rien, ne pas être trop contrarié par les événements extérieurs. J’envie ceux qui peuvent écrire dans n’importe quelles conditions, soûls, morts de fatigue, déprimés, etc. J’ai lu que Dickens écrivait parfois à la table de la cuisine, en jasant avec la visite, pendant que sa centaine d’enfants criait et courait partout. Je trouve ça plus impressionnant que tous les exploits de David Blaine (David Blaine étant ce dude qui a retenu son souffle sous l’eau pendant dix-sept minutes, qui a passé soixante-deux heures tout nu dans un bloc de glace, qui a vécu quarante-quatre jours dans un coffre en plexiglas).

J’écris sur un vieux divan dans le sous-sol, avec mon portable sur mes genoux. ♦

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