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Les termes de la dystopie

Dystopie, uchronie, utopie: Mathieu Lauzon-Dicso décortique huit termes liés aux littérature de l'imaginaire.

Lexique

Dystopie, uchronie, utopie: Mathieu Lauzon-Dicso décortique huit termes liés aux littérature de l'imaginaire.

Une DYSTOPIE est une œuvre d’anticipation sociale qui relève, la plupart du temps, de la science-fiction. Le récit met en scène une société futuriste qui prive ses citoyen·nes de leurs libertés individuelle et collective, de leur bonheur, voire de leur humanité. Dans ce contexte néfaste, chacun·e est surveillé·e, contrôlé·e et puni·e afin que soit maintenu l’ordre au profit de certain·es privilégié·es – contre lesquel·les le héros ou l’héroïne se soulèvera dans bon nombre d’intrigues.

 

Une UTOPIE est un non-lieu, un pays imaginaire où l’ensemble de la vie sociale est minutieusement organisé de façon à ce que tout y soit harmonieux. Or, ses rouages «théoriquement parfaits» ne diffèrent jamais beaucoup de ceux de la dystopie… Reste le principe de «l’utopie ambigüe», pour reprendre l’expression de l’écrivaine américaine Ursula K. Le Guin: «des mondes qui peuvent se réinventer, ni parfaitement bons ni totalement mauvais».

 

Apparue au début des années 1980, l’école CYBERPUNK – dont les référents ont été cristallisés par le roman Neuromancien (1984) du Canadien William Gibson – rassemble des récits qui se déroulent dans un futur proche, violent et gris. Des antihéros désillusionnés, aux corps organiques augmentés, projettent leurs consciences dans des structures virtuelles contrôlées par les conglomérats industriels qui dirigent le monde de demain. Ces sociétés sont, en fait, des dystopies économiques qui s’assument.

 

Le SOLARPUNK est un genre multimédiatique, tant littéraire que cinématographique ou vidéoludique, qui s’inspire du STEAMPUNK: si le second se tourne vers le passé, reconfigure la société victorienne et la projette dans un futur où le moteur à vapeur s’est développé en applications technologiques hallucinantes, le solarpunk imagine plutôt comment les énergies renouvelables, notamment solaires ou éoliennes, amélioreront la condition humaine. Il raconte des avenirs lumineux et positifs, à contrepied de la dystopie.

 

Terme utilisé par l’écrivain·e Alexandra Rowland sur la plateforme Tumblr pour la première fois en juillet 2017, le HOPEPUNK se veut une réponse à la dystopie présentée en tant qu’état naturel du monde. Il s’agit d’une façon d’entrevoir la narration spéculative (fantasy, science-fiction,etc.) par l’entremise de la bonté, de l’espoir et de la douceur. Ces comportements y sont perçus comme des actes puissants et contestataires qui prémunissent contre les récits cyniques, légions en littérature de genre.

 

L’UCHRONIE est un «non-temps» (tandis que l’utopie est un «non-lieu»). À partir d’un point de divergence historique, l’uchronie imagine un enchaînement d’événements différents de ceux connus. C’est le fameux «Et que se serait-il passé si…?». Plusieurs romans uchroniques appartiennent aux dystopies: c’est le cas du Maître du Haut Château (1962), de Philip K. Dick, où les forces de l’Axe ont vaincu les Alliés en 1947…

 

On parle d’AUTOCHTOFUTURISME quand des artistes représentent l’avenir à partir des savoirs actuels et ancestraux de leurs cultures autochtones. Lorsqu’il tend vers la dystopie, le futurisme autochtone amplifie les relations de pouvoir qui ont historiquement placé les Premières Nations, les Inuits et les Métis au Canada, et les peuples autochtones ailleurs dans le monde, sous le joug des colons européens et de leurs descendants. Ces dystopies misent toutefois sur l’espoir d’une jeunesse apte à survivre et à résister; Pilleurs de rêves (Boréal, 2019), de Cherie Dimaline, en est d’ailleurs un exemple.

 

La littérature Young Adult, ou YA, est une catégorie de fiction qui s’adresse aux adolescent·es, mais qui rejoint un large lectorat adulte. La dystopie en est l’un des genres de prédilection, comme le rappelle le succès des séries emblématiques Hunger Games, de Suzanne Collins, ou Divergence, de Veronica Roth. La YA dystopique jongle avec les lieux communs qu’on lui attribue, par exemple: une orpheline élue, prise dans un triangle amoureux, mènera sa génération dans une révolte contre l’autorité corrompue…
 

 


Mathieu Lauzon-Dics a enseigné les littératures de l’imaginaire au collégial pendant huit ans. En 2016, avec ses étudiant·es, il a créé le Prix des Horizons imaginaires, qu’il coordonne toujours. Malgré la pandémie, son amoureux Ilya et lui viennent d’ouvrir la Librairie Saga. Il codirige aussi la nouvelle collection «VLB imaginaire» avec Geneviève Blouin.

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